Poptraits


  • Poptrait n°9, Lou raide

    par Adehoum Arbane le 02.12.2013 Lou Ride, vieux. Lou Raide, mort. Pâle figure oculaire de New York – la grosse pomme bouffée de vers – est allée six feet under ground. Se faire lui aussi ronger le corps, les globes, la chair jusqu’aux os. Lou Reed. Dernière cicatrice dans le ciel de l’est américain. Lou en guise de masque pour dissimuler une vie tourmentée, homosexualité latente, électrochocs. Lou hurlant à la lune dans le caniveau, pour effrayer les journalistes ou rappeler à l’ordre la longue meute des fans. 
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  • Poptrait n°8, Zappa go back to life

    par Adehoum Arbane le 30.10.2012 Jimmy Carl Black, l’indien navajo des Mothers of Invention, m’attendait devant l’entrée du Westwood Memorial Park. Le ciel était lourd, d’un noir intense, compact. La nuit régnait sur le sommeil provisoire des hommes et celui, plus définitif, des morts. Nous entrâmes tous les deux serpentant silencieusement le long des stèles, sans troubler le silence aussi uniforme et droit qu’une mer d’huile. Les arbres dessinaient au-dessus de nos têtes des motifs inquiétants, presque gothiques. De temps à autre, un claquement d’ailes brisait l’épais masque des nues. Nous sursautions alors. Comme ces jouvencelles dodues échappées d’un mauvais films d’horreur. Nous errâmes un long moment qui nous parut une éternité, l’endroit n’était-il pas au fond propice à cette fulgurante impression. L’aventure, insolite, avait tous les ingrédients d’une intrigue d’Edgar Alan Poe. Mystère impénétrable et terreur sourde.
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  • Poptrait n°7, scuse us while we kiss the sky

    par Adehoum Arbane le 02.10.2012 L'endroit est, comment dirais-je, lisse. Lisse et blanc. D'une pureté abyssale quoique rassurante. Comme dans une boîte, une boîte au périmètre immense et au plafond si haut qu’on ne peut l'atteindre, pas même du regard. Les murs laqués resplendissent comme des miroirs. À y regarder de près, on devine chaque silhouette, pâle figure fantomatique, dont les formes se troublent sitôt que l'on cligne des yeux. Je regarde autour de moi et, bizarrement, je m’attarde sur le moindre son. Inexistant. L'espace ne résonne pas, le bruit y est aboli, l'air mat et plein. Et pourtant, aucune sensation d’oppression, d'étouffement. Paysage fait de perpendiculaires et d’horizontales, vaste, lacté et silencieux. Décontraction en trois dimensions. Mon œil gauche glisse, suivi du droit et tous deux s'arrêtent sur une plaque semblable à celle d’une multinationale où l’on peut lire dans une typographie au raffinement sobre le mot « Paradis ». Une sonnerie d’ascenseur retentit, nette et mélodieuse. Deux portes s’ouvrent dans un ronronnement mécanique. Jimi Hendrix apparaît dans une élégante combinaison blanche comme échappé d’un film de science-fiction.
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  • Poptrait n°6, rude graine de producteur

    par Adehoum Arbane le 04.09.2012 Paupières de granit, mur de ma fatigue. Il fait pourtant jour, le soleil n’a pas encore pris la tangente. Il pose de façon parfaite au milieu du cadre imaginaire que dessinent virtuellement mes doigts, ses rayons sont une caresse sur le carreau sali dont les traces constituent autant de détails sur lesquels l’œil s’attarde. Mais la fatigue est trop pesante. Le labeur a eu raison de ma condition. Il m’a fallu ainsi des jours et des nuits pour venir à bout de Something/anything?, troisième album et pièce maîtresse dans l’œuvre féconde de Todd Rundgren.
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  • Poptrait n°5, portrait Rimbaud

    par Adehoum Arbane le 14.08.2012 Morrison, entre-jambes de l’Amérique. Rêve de cuir qui finira en cauchemar post mortem. Trépassé et cependant dieu vivant. Elvis moderne, Sinatra rock. Agent provocateur, politicien de l’érotique comme il le dira plusieurs fois devant une presse américaine avide de phrases chocs. Oui, il fut tout cela et bien plus. Un homme avant la star immense que l’on sait. Avec sa force. Ses faiblesses. Son amour du Jack Daniel’s constituant l’un des nombreux vices rangés dans le cabinet de curiosités d’une existence en vérité extraordinaire. Comment arriver à cerner le personnage ? Un article sur les Doors n’a jamais été envisagé sans faire de Morrison l’épicentre thématique, mythologique, au grand dam des trois autres musiciens dont les qualités sont pourtant à l’origine du « son » du groupe. Alors, oui assumons ! Assumons le portrait délesté, autocentré, exclusif, égoïste, pur, sans groupe, ni producteur, une vision, dieu sait qu’il aurait aimé ce mot, une vision donc d’un américain au dessus des autres, d’un artiste qui rivalisa avec les plus grands.
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  • Poptrait n°4, l’année de l’araignée(s)

    par Adehoum Arbane le 07.08.2012 Au commencement, Bowie était déjà Bowie. Même si dans l’alcôve secrète de son cerveau tendue de taffetas criard, il n’était que David Jones. Remontons le fleuve du temps, jusqu’en 1964. Première apparition télé à la BBC. Visage juvénile perdu dans un casque blond et soyeux. Ses yeux, petites billes bleues scintillantes, racontent déjà quelle aventure extraordinaire il va bientôt vivre. Pour l’heure, il s’agit d’introduire son club, The Society for the Prevention of Cruelty to Long-Haired Men. Deux ans plus tard, le conservatisme et la bien-pensance s’inclinent piteusement devant la génération pop ; mods, hippies, héros modernes du Flower Power. Et devant Bowie donc. Lui tricote tranquillement ses premiers tubes, Love You Till Tuesday, She’s Got Medals, In The Heat Of The Morning en tête.
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  • Poptrait n°3, Lord of hammond

    par Adehoum Arbane le 24.07.2012 Alors que je réagissais sur l’Agora Digitale à la mort de Jon Lord, organiste de Deep Purple, tout en démolissant les bozos pseudo-rockeurs de U2, quelques ploucs furibards me taxèrent à la va-vite de snob. Guère surpris ni même vexé, je leur répondais avec l’assurance qui sied en pareille situation que oui j’étais snob, que oui un rock critic se devait de l’être à minima pour exercer dignement, en toute indépendance, son office. Un rock critic normal, c’est comme une chanson sans riff, c’est comme un riff privé d’un solo d’orgue. Et donc par voie de conséquence, comme une chanson de Deep Purple sans un chorus de Jon Lord.
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  • Poptrait n°2, le prénom qui s'était fait un nom

    par Adehoum Arbane le 03.07.2012 Plusieurs jours déjà que le ciel est frappé d’incontinence. Les mots sont plus bleus que les nues. Le théâtre Marigny résiste majestueusement à ces contrariétés atmosphériques. Superbe dans ses habits de stuc. L’entrée déploie dans un tournoiement de pourpre un vaste décor de tapis et de miroirs sous les ors éternels et les lustres témoins. Un rêve de classicisme. Ici, les pas sont des soupirs. Des confidences. Les siècles, vaste foutoir d’histoires saccadées, sont passés par là. Une porte s’entrouvre, la pénombre s’écoule alors et avec elle les oh, les ah, les expressions heureuses des spectateurs visiblement conquis. Je me faufile avec élasticité et m’effondre dans un fauteuil moelleux.
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  • Poptrait n°1, production between the buttons

    par Adehoum Arbane le 26.06.2012 Suite à mon dernier papier, les 10 producteurs de légende qui ont fait celle du rock, de nombreux fans se sont émus de l’absence bizarre, honteuse, incompréhensible, impardonnable d’Andrew Loog Oldham. Comme je ne peux remettre en cause le principe même des « 10 » par un erratum quelque peu tardif, j’ai décidé de consacrer à l’homme une chronique en bonne et due forme.
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