Rétrospective ?

par Adehoum Arbane  le 09.01.2018  dans la catégorie A new disque in town

Au "c’était mieux avant", bêtement remisé par les thuriféraires de la modernité, préférons l’image d’un passé pop en forme de corne d’abondance dont on n’aurait pas fini d’explorer les moindres recoins. Non que notre époque ne soit pas digne d’intérêt, musicalement parlant, mais il semblerait que les trois âges d’or – 60s, 70s, 80s – de la pop nous réservent encore quelque surprise. Ainsi, on aura donc attendu 2017 pour découvrir des disques, connus ou non, parfois approchés ou pas, et dont l’écoute intégrale relève de la révélation mystique. Certains ont réapparu par l’entremise de la réédition quand d’autres ont été tout bonnement recommandés par un camarade… Voire un disquaire qui devient, en un rien de temps, un camarade pour la vie ! Ne parlons pas des découvertes faites au hasard. Souvent la magie de la pochette fait lentement son œuvre, infuse ce qu’il faut de mystère pour nourrir la curiosité. Toutes ces expériences de vie conjuguées donnent une année de coups de cœur inespérés. Et parce que tout cela reste passionnel donc subjectif, prenons s’il vous plait ce classement dans le désordre, c’est à dire hors du temps et en suivant la voie royale qui aura mené chacun jusqu’à nous.

Dans le marché du rock, la réédition tient une place de choix. Si certaines œuvres se trouvent parfois dénaturées à force de ressortir en formats DELUXE, EXTENDED, il existe des labels spécialisés dans l’exhumation, restaurée ou synthétisée. Cette année a vu la sortie en fanfare de deux albums exceptionnels : Kickin Child (Lost Columbia Album 1965 de Dion et la compilation de pop folk japonaise, Even A Tree Can Shed Tears. Si nous avons déjà parlé du Dion, son ineffable fraîcheur pré-Revolver, renvoyant à l’énergie des premiers enregistrements des Fab, le cas Even A Tree Can Shed Tears s’avère impossible à résumer. D’abord parce qu’il s’agit d’une large rétrospective couvrant quatre années fécondes. Riche de dix-neuf titres, elle rassemble groupes et interprètes et témoigne d’une belle créativité, loin des clichés qui viendraient à l’esprit. De plus, le fait que les artistes chantent dans leur langue natale ajoute au charme des chansons parmi lesquelles des choses aussi raffinées que Anata Kara Toku E, extrait de Misora, de la fantastique Sachiko Kanenobu – sorte de Joni Mitchell nipponne. Saluons au passage le travail titanesque mené par les équipes de Light In The Attic.

Les fans de musique ont leur temple ! Non ce n’est pas la salle de concert, aussi importante soit-elle. Il s’agit du disquaire. Et pas le disquaire neuf – pire la chaîne – mais bien le petit dealer d’occasions. Ces boutiques si chatoyantes fleurissent partout en France et au-delà, aux quatre "soi-disant" coins du monde. Bref, considération sémantique mise à part, ces lieux souvent désordonnés sont les lieux de pèlerinage du voyageur en vadrouille. Ainsi, un voyage à San Francisco fut l’occasion rêvée pour écouter enfin, pour la première fois, le sixième album de Pearls Before Swine, Beautiful Lies You Could Live In, L’Ophélie de John Everett Millais qui s’étale indolemment sur la pochette, cache onze chansons délicates et tendres. Plus proche de nos rivages, l’Angleterre et, lorsque l’on pousse dans les terres, Londres. Capitale économique, ville cosmopolite, Londres fut aussi le cœur de la révolution pop. Les Hollies ne font pas partie du peloton de tête des formations psyché britanniques. Leur unique fait d’arme a été de fournir en 1969 le & Nash de Crosby, Stills. Coincé un an après entre Stills et Young.  En 1972, les Hollies ont donc perdu Nash mais conservent de leur savoir-faire en matière de songwriting. En témoigne le sublime Romany qu’il convient de réévaluer tant il possède de beaux restes. Aux dires du disquaire qui le proposait, un album des Hollies comportent au moins deux ou trois excellentes chansons. C’est le cas ici et même davantage.

Musique allant de pair avec passion et passion avec partage, nous devons à la seule amitié, à la franche camaraderie ou aux conseils avisés d’autrui l’écoute heureuses de trésors jusque-là injustement boudés. En premier lieu, citons Dare de Human League. Certes, le hit single Don't You Want Me qui referme l’album avait largement dépassé tous les curseurs de la notoriété, mais le reste valait le détour. C’est chose faite ! La deuxième révélation, car c’en est une, repose hélas sur un malentendu, sans mauvais jeu de mots. Les Carpenters ont toujours été considérés, à tort, comme un groupe insipide, mauvais. Cette posture snob a été balayée par la lecture de la biographie consacrée à Karen Dalton, formidablement bien écrite par Clovis Goux. Loin du pathos, le journaliste et écrivain explore au travers de son destin de mortelle le mal qui ronge l’Amérique des 70s. Se plonger dans son récit, c’est avoir l’envie irrépressible de se plonger dans la discographie du célèbre duo. Sorti en 72, A Song For You synthétise avec talent – et un peu plus de folie – le savoir-faire des Carpenters : la chanson et son corollaire, le refrain fédérateur. S’y ajoute l’émotion portée par le timbre suave mais fragile de Karen. Un chef-d’œuvre, rien de moins. Idem pour Nilsson Schmilsson qui avait échappé aux radars du bon goût. L’erreur est elle aussi corrigée, l’album ne méritant que des louanges. Enfin, il convient de finir par deux disques appartenant aux décennies 80 et 2000. Men At Work avait accédé aux charts grâce à deux singles, Who Can It Be Now ? – extrait du premier Lp du même nom – et Overkill en deuxième position de leur deuxième album, Cargo. Sans mentir, ce dernier renferme dix perles d’écriture et qui n’ont pas trop été dépréciées par la production d’époque. Sur Cargo, Men At Work sonne comme un Police ligne claire. Dix-neuf ans après, Brendan Benson sort lui aussi son deuxième album qui le verra accéder à la reconnaissance des masses. Lapalco n’est pas un chef-d’œuvre indépassable, ni un disque emblématique de son époque : il n’en demeure pas moins un album de power pop jubilatoire bien écrit, bien produit et qui reste en tête.

Voilà… Sinon pour le reste, voici le vrai top 10 de l’année achevée dans un soupir de lassitude…

 

Best of pop 2017

Temples, Volcano

Kevin Morby, City Music

Ariel Pink, A tribute to Bobby Jameson

Courtney Barnett & Kurt Vile, Lotta Sea Lice

Roger Waters, Is This The Life We Really Want ?

Miranda Lee Richards, Existential Beast

The Horrors, 5

The War On Drugs, A Deeper Understanding

Father John Misty, Comedy

Flotation Toy Warning, The Machine That Made Us

 

Best of french pop 2017

Juliette Armanet, Petite amie

Klo Pelgag, L’étoile thoracique

Fishbach, À ta merci

Etienne Daho, Blitz

Matthieu Malon, Désamour

 

 

 

 

 

 

 

 

 


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