L’Amérique en force, l’Angleterre à la peine, la France en 1ère division.
Alors que dans les rédactions on s’empresse de boucler le classement des meilleurs albums rock de l’année 2012, il convient de ne pas céder à la panique, encore moins à la facilité. L’exercice est connu de tous, des rock critics – certes - mais également des fans. C’est un moment attendu qui vient clore l’année en beauté, au milieu des cascades de Champagne bon marché et des bêtisiers rabâchés. Cette année pourtant, j’ai cru bon de déroger à la règle que je m’étais édictée depuis toujours à savoir ne pas livrer un Best Of des 100 meilleurs disques mais préférer l’épure d’un « top » ramassé à 10 albums mûrement choisis, patiemment écoutés et enfin honnêtement chroniqués. Ainsi, j’ai retenu 12 œuvres d’abord parce qu’à mon sens elles méritaient d’y figurer. Il est vrai, un choix par définition est cornélien. Mais je crois pouvoir dire que ma décision est prise en conscience et qu’elle correspond aux options que j’ai sans cesse défendues : le rock sous toutes ses formes, quels que soient les genres, indépendant ou produit par des gros, non, des grands labels. Une fois la chose actée, je me suis penché sur la sélection à proprement parler et les œuvres qui la constituent. Un premier constat s’impose. L’Amérique triomphe naturellement – mais attention – par la seule force des talents qu’elle a vu naître. Deuxièmement, on remarquera la sous représentation des anglais, pourtant maîtres incontestés en la matière. Cependant et il convient de le souligner, les trois lauréats retenus – qu’ils soient novices ou vieux routards du rock – portent en eux les promesses d’un avenir radieux. Ancienne île de l’empire britannique, l’Australie sort une fois de plus du lot avec un groupe maison – le même à vrai dire – Tame Impala dont les talents, surtout ceux de son leader, ne sont plus à démontrer. Je voudrais faire taire au passage les quelques esprits chagrins qui, en toute probité, ont un peu trop rapidement blâmé la formation de Kevin Parker. Dernière évidence et non des moindres puisque la France est parvenue à donner de la voix avec deux artistes superbes, Lescop et Rover dont la singularité les a propulsés au rang de révélation de l’année. Enfin, les douze albums ne sont pas classés par ordre de préférence. Ils obéissent simplement à la seule suprématie territoriale évoquée plus haut. Parlons maintenant des groupes et de leurs Lp. Je n’en ferai pas l’étude détaillée mais on peut cependant noter la consécration légitime de deux formations qui comptent parmi les plus passionnantes de la décennie 2000, les Shins et Grizzly Bear. Chaque groupe possède ses atouts, ses particularités, son génie même, malgré une discographie relativement réduite pour les deux. Phantom Buffalo, bien qu’ancien, arrive avec son dernier disque à s’extraire de l’anonymat, c’est en tout cas tout le mal qu’on lui souhaite tant Tadaloora brille de mille feux. Trois petits nouveaux s’illustrent avec des albums tantôt classes, barrés et bravaches. Electric Guest comme Ariel Pink ou Foxygen se sont tout bonnement distingués cette année. Prise en sandwich, la France relève la tête. Rover et son premier disque éponyme a su privilégier la force de l’écriture et une production musicale ayant digéré les classiques, Beatles, Bowie, Lou Reed. Lescop quant à lui sonne la charge d’une variété délestée de ses complexes passés, gracile, moderne, tonitruante. Les grands bretons sont donc les cancres de cette édition 2012. Ne nous y fions pas. Car Django Django, Dog Is Dead et Spiritualized ont tous fait montre d’un talent hors du commun. Les premiers sont devenus LA sensation discographique et live de l’année avec leur pop truffée d’électronique, magnétique et minimale. Les deuxièmes ont prouvé que les Lalalas avaient toujours droit de citer. Enfin, Jason Pierce, cerveau central de Spiritualized – cerveau pas encore cramé – a réussi à emballer un album pacifié, serein, doux comme une confiserie et dans la droite lignée de Lou Reed, autre figure d’un rock suave et déviant. Je ne reviendrai pas sur Lonerism bien que l’album fourmille d’idées, de refrains chamarrés et d’impros dinguos. En guise de conclusion, je dirai que le propre d’une année s’achevant est d’ouvrir des perspectives, des espérances comme disent parfois les professionnels de la langue de bois. 2013 s’annonce comme un grand cru – pour la pop anglo-saxonne d’abord avec les premiers pas en solo de Christopher Owens, ex leader de Girls – et surtout pour la scène française et la toute jeune Variété Alternative. C’est Aline qui va ouvrir le bal avec un très attendu premier album, Regarde le ciel, suivi par Charles-Baptiste qui lancera une double offensive : un premier album à son prénom, Les sentiments inavouables, et un mini-album concept électro-prog avec son âme sœur musicale, le trop confidentiel mais néanmoins génial Alexandre Chatelard. Bref, on a hâte d’y être.
Best Of 2012 :
The Shins, Port Of Morrow
Grizzly Bear, Shields
Phantom Buffalo, Tadaloora
Electric Guest, Mondo
Ariel Pink's Haunted Graffiti, Mature Themes
Foxygen, Take The Kids Off Broadway
Lescop, Lescop
Rover, Rover
Django Django, Django Django
Dog Is Dead, All Our Favorite Stories
Spiritualized, Sweet Heart Sweet Light
Tame Impala, Lonerism
http://www.deezer.com/fr/playlist/165299471
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