Faut-il encore croire aux buzz ?
Ah, cette agaçante « viralité » qui est vite devenue l’alpha et l’oméga de l’internaute, pire de la presse musicale professionnelle. Pas un jour qui ne se passe sans sa révélation, SON BUZZ censés faire frémir la webzone ! Parfois, la rumeur voit juste et le groupe confirme toutes les promesses placées en lui ; ce fut le cas d’Arcade Fire ou de Fleet Foxes. Le plus souvent, l’enthousiasme se dégonfle pour se transformer en succès mollasson, voire en flop total. Tant et si bien que l’on peut légitimement s’interroger : le buzz, une fausse bonne idée ?
Buzz & bouse.
Un cas suffit aujourd’hui à amender cette thèse. Lana Del Rey. Sans tomber dans la vendetta à son endroit, l’histoire digitale de la diva pop demeure édifiante. Point d’attaque ad hominem. Sauf que. Le buzz est né précisément de l’idée de réincarnation même. Retour en arrière. Derrière la sublime vamp Lana Del Ray, une jeune new yorkaise Elizabeth « Lizzy » Grant écume les bars de l’East Village, rêvant à Dylan et surtout à un avenir radieux. Un maxi sort qui passe inaperçu. En pleine mue (avant la moue), elle se pare du sobriquet éminemment cinématographique de Lana Del Rey. Un premier opus voit le jour. Aucun frémissement sur l’échelle de Richter de la pop music. C’est alors que la fière gamine balance sur le net quelques chansons fantomatiques et inspirées, clipées at home. La blogosphère s’émeut, les influenceurs frisent la semi molle et comme toujours, la viralité finit par faire son œuvre. Janvier 2012, Born To Die arrive dans les bacs. Douche écossaise, oups, new yorkaise. Pourquoi ? Il s’agit je crois du pire exemple d’orchestration médiatique qu’il nous ait été donné de voir. 1/Le basculement identitaire. Avant Lizzy cultivait des faux airs de blondie, punk en diable, femme revêche, figure rock par excellence. On ne saurait dire qui en a décidé ainsi, mais la rockeuse se réinvente de la tête aux lèvres : chevelure cuivrée ondulante, regard ombrageux, bouche pulpeuse, poses glamour, parfois super sexy. Le tout estampillé « David Lynch reloaded ». Risible. Enfin pas pour tout le monde. Certaines éminences grises de la coolitude en papier glacé se pressent au chevet de la nouvelle star en devenir. Quelle est belle ! Et ses chansons, de la pop cinématrographique (rien que le terme provoque en moi une poussée d’urticaire). 2/Le culte de l’image. Je ne parle pas seulement du physique de belle gosse sépia mais des clips que la miss pop parsème depuis l’été 2011. Bah ouais, comme l’album ne sortira qu’en 2012, il faut faire patienter le chaland. Alors, on filme à tout va. On sait que l’Internet reste friand de ces choses-là. C’est la fameuse génération Youtube, à peine plus abrutie que la précédente, dont les yeux se maquillent des couleurs livides de la mir. On nous explique que Lana est à l’œuvre. Avec ses petites mimines. Le clip quant à lui mêle films de vacances à la pellicule brûlée, pour le côté vintage, séquences cinoches avec montée des marches festivalière, initiales hollywoodiennes perdues dans un ciel noir et blanc et bien sûr des images de la diva. Chantant dans un réalisme solaire. Même écueil avec ses nouveaux titres, Born To Die, Blue Jeans. Du coup, on hésite en permanence entre le fait-main et la stratégie marketing bien huilée. Ne l’oublions pas, son label Interscope Records fait partie de l’écurie Universal Music Group. 3/La culpabilité évidente des « leaders d’opinion ». Ils bruissent de la moindre nouveauté. Ils la postent, l’uploadent, la twittent. S’exonérant ainsi de tout commentaire, de toute analyse. Car derrière la buzz, il y a surtout celui qui l’a lancé. Il aura été le premier à en parler, à « découvrir » l’artiste. Il pourrait presque prétendre au titre d’attaché de presse, d’impresario ou de producteur, sans doute les trois à la fois. Même s’il doit prendre telle une mayonnaise ô combien délicate, le buzz se lance le plus tôt possible, avec célérité. Puis on laisse mijoter. Les followers entrent en jeu. Ils assurent le service après vente de la promotion digitale. Ils y croient aussi sans même parfois avoir jeté un œil au produit. Comme dit le proverbe, les promesses n’engagent que ceux qui les croient. Et qui les font croitre en l’occurrence. Je pointe ici les deux péchés capitaux autant que capiteux du web : rapidité et vacuité, l’un étant le prolongement naturel de l’autre. D’autant que la musicologie ne souffre pas de la médiocrité ou du manque de labeur. L’analyse musicale, c’est un métier. Même un amateur se doit de rester exigent, attentif, concentré, en état d’alerte intellectuelle maximum, sans céder aux sirènes de la facilité. La conjonction de ces trois facteurs a inexorablement conduit au désastre, à la défaite. En écoutant l’album très attentivement, on demeure navré. De constater que certains titres ne tiennent pas la corde des singles. De découvrir des morceaux épouvantables, vulgaires dans leurs habits rap. Manquant de cohérence, le disque déçoit, les bonnes chansons se noient au milieu de l’océan de nullité des dix autres.
Au global.
Flonflons, violons et beats ridicules n’auront pas fait la différence. Et le buzz de s’effondrer dans les rires de la critique. Et pourtant, Lana a fait preuve de génie, de discernement : le titre du disque, Born To Die, dresse à lui seul la chronique d’un flop annoncé.
http://www.youtube.com/watch?v=BeT_MtR4wus&feature=related
Commentaires
Dobrij denjpocitala vashu pspireeku i po
13.05.2012
Dobrij denjpocitala vashu pspireeku i poetomu voznik vopros.vperedi pereezd v Vankuver, jesli u vas uze jesj hotj kakaja to informacija kak deshevle perevesti veshi,budu ocenj priznateljna.kakije varianti vi nashli? po vode ili po vozduhu,podelitesj,jesli udalosj najti bolee deshovij variant,chem arendu konteinera.zaranee spasibo
Archibald Le mildiou
19.06.2012
Je ne peux qu\'abonder dans votre sens pour Lana Del Ray. Certes on atteint pas le degré de nullité absolu de Lady Gaga, mais quelle déception quand j\'ai pu entendre la demoiselle en action. J\'entendais et lisais de partout des propos laudateurs,on l\'a qualifiait même de génie, de phénomène(par exemple Les Inrocks). Au final des chansons pas mauvaises, mais pour le moins moyennes, et pas originales du tout. On est bien dans l’ère du buzz à outrance et de l\'omnipotence de l\'image.