Carnets de déroute-Chapitre 3 : Wild Horses !
par Adehoum Arbane le 05.12.2007 dans la catégorie Récits & affabulations Chapitre 3, troisème partie
Les sept montures se mirent à chanter, les voix portées par une sombre mélopée aux guitares spatiales ouvrant dans l’espace des vortex soniques, le portrait de Kate surnageant au-dessus de l’épais nuage électrique d’un timbre marmoréen, solitaire, inflexible, linéaire, brumeux. These Days, incantation magique qui revenait sans cesse en boucles hypnotiques, ces jours semblaient joyeux, doux mais aussi inquiétants, désespérés, vrillés par la pesante incertitude du temps. Les sons étaient drogués, puissants, anxiolytiques, puis les derniers échos s’évaporèrent dans la tessiture des minutes. J’entends dire depuis des années, « oui, le rock est mort », « L’agonie va bientôt prendre fin » et là à l’écoute de ce morceau, de These Days, incroyable odyssée dark rock, je me dis en moi même que le mot inventé par Alan Freed sur les ondes américaines, quelques 50 ans plus tôt, n’était pas près de se taire, la révolte juvénile est un concept éternel. Demandez donc à Iggy Pop si le rock est enterré ?... Le morceau venait de s’achever (pas le rock !), et dans un hennissement maîtrisé, Bobby prit la parole pour nous présenter les membres de sa formation installée à L.A., California. Le fougueux leader des Xu Xu Fang était un homme, enfin, un cheval jeune et élégant, très courtois, peu avares de ses mots. Nous échangeâmes pendant un moment dont l’élasticité rappelait les épreuves que les drogues musicales font subir au temps, au cerveau, à la conscience de tout percevoir dans une forme de dilatation sidérée, artificielle mais au combien spirituel, l’homme est perpétuellement en quêtes de nourritures abstraites comme les poèmes de Nietzsche, les réflexions de Platon et la défonce made in Los Angeles. L’heure vint de nous quitter et je promis à Bobby de reprendre contact avec lui sous une forme plus conventionnelle. Le soir s’effondra comme épuisé, le poids des étoiles aidant, et je retrouvais le bonheur consumériste de mon foyer, les joies du plat irradié par l’explosion atomique d’un four micro-ondes, la soirée passée le regard vissé sur l’écran codé du poste de télévision. Le sommeil vint à moi comme une maîtresse, avec violence et douceur. Puis, plus rien.
À suivre…
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